Invictus










Date de sortie : 13 janvier 2010
Durée : 2h12 min
Réalisé par : Clint Eastwood 
Genre : drama, historique, biopic
Récompenses : 8 nominations dont meilleur acteur, meilleur film et meilleur réalisateur

Synopsis :
En 1994, l'élection de Nelson Mandela consacre la fin de l'Apartheid, mais l'Afrique du Sud reste une nation profondément divisée sur le plan racial et économique. Pour unifier le pays et donner à chaque citoyen un motif de fierté, Mandela mise sur le sport, et fait cause commune avec le capitaine de la modeste équipe de rugby sud-africaine. Leur pari : se présenter au Championnat du Monde 1995...




Trame du film :
Je suis maitre de mon destin, je suis capitaine de mon âme. 

Les relations entre Pienaar et Mandela ont été le sujet d'un livre de John Carlin, Playing the Enemy: Nelson Mandela and the Game that Made a Nation. Ce livre a été adapté en film par Clint Eastwood sous le nom d'Invictus. Morgan Friedman joue le rôle de Mandela et Matt Damon le rôle de Pienaar.

Le film se déroule en Afrique du Sud au début des années 1990. A l’époque, le pays est divisé entre la communauté noire et la communauté blanche. Une ségrégation est imposée dans tout le pays par le gouvernement. C’est l’apartheid.
Au début du film,  l’homme politique, Nelson Mandela, est libéré de la prison Victor Verster par De Klerk, le chef d’Etat sud-africain de l’époque.
Toute la communauté noire le soutient ainsi que le Congrès national africain (ANC) qui se bat pour participer au pouvoir politique. Le pays est alors au bord de la guerre civile et l’insécurité est grandissante.
Le réalisateur, Clint Eastwood, choisit alors de filmer avec des couleurs qui créent l’illusion d’images de l’époque du pays qui montrent des manifestations politiques violentes entre les noirs et les autorités. Cela permet de rendre les scènes plus réelles, plus authentiques et donc l’impact sur le spectateur en est renforcé. On se rend alors compte de la souffrance du pays et des problèmes profonds de division de la population que connaissait l’Afrique du Sud.
Le réalisateur a choisi de faire plusieurs plans sur les bidonvilles pour montrer la pauvreté dont souffre le pays mais aussi les inégalités dont il fait l’objet. Beaucoup de femmes noires sont encore maitresses de maison pour des familles aisées blanches. Il existe toujours une hiérarchie en fonction de la couleur de peau.
Le 27 avril 1994, Nelson Mandela est élu Président de la République d’Afrique du Sud. Son discours à Union Buildings, situé à Pretoria, rencontre un énorme succès et la ferveur populaire est au rendez-vous.
Le réalisateur décide alors de mettre en scène une famille blanche aisée qui s’inquiète de son avenir suite à l’élection de Nelson Mandela en tant que Président de la République. Le fils de cette famille est le capitaine de l’équipe de rugby nationale, François Pienaar. Ceci est représentatif des consciences de l’époque. La population blanche est méfiante vis-à-vis de ce nouveau gouvernement et craint des représailles.
On voit par ailleurs que la coopération est délicate entre les deux communautés au début du mandat de Mandela. Les gardes du corps de ce dernier, par exemple, montrent une certaine appréhension à travailler ensemble. Les gardes du corps noirs qui soutiennent Mandela depuis ses débuts en politique ne peuvent se résigner à faire confiance à des gens blancs qui l’ont mis quelques années plus tôt en prison.

Or Nelson Mandela souhaite une « nation arc-en-ciel ». Pour lui, la réconciliation des deux communautés passe par le pardon. Et c’est ce qu’il va s’appliquer à faire durant ces premières années de présidence. Dans ce film, on s’aperçoit que Nelson Mandela est quelqu’un de pragmatique et de réfléchi. Ce dernier veut notamment ménager la minorité blanche non seulement pour le facteur humain car il ne veut pas d’une population divisée mais aussi parce que cette minorité contrôle toujours l’armée, la police et l’économie.

Le deuxième personnage principal du film, c’est le rugby. Ce sport occupe une place centrale et catalyse tous les espoirs du film. Dés le début du film, on remarque que l’équipe du rugby nationale, les Springboks, ne fait pas l’unanimité et n’est en réalité soutenue que par la communauté blanche. En effet, cette équipe représente pour les noirs la période de l’apartheid. Le premier match que l’on voit qui oppose l’Angleterre et l’Afrique du Sud illustre bien ceci puisque les noirs présents dans le stade soutiennent en réalité les Anglais. Les Springboks ne sont alors pas très brillants et font des résultats décevants.
La façon dont sont filmés les matchs n’est pas anodine non plus. La caméra est sur le terrain, à côté des joueurs de rugby eux-mêmes. Le spectateur a donc l’impression d’être un joueur et de vivre la scène.

Ce qui marque ici c’est la détermination de Nelson Mandela malgré les obstacles. Ce dernier souhaite faire de l’équipe de rugby des Springboks un symbole de cette nouvelle nation multiraciale sud-africaine. Pour restaurer la grandeur du pays au niveau international mais aussi redonner confiance en leur pays aux Sud-Africains eux-mêmes, Mandela va demander au capitaine de l’équipe de rugby, François Pienaar, de gagner la Coupe du Monde de rugby. Cette compétition est par ailleurs accueillie par l’Afrique du Sud en 1995.
En faisant cette requête, Mandela ne voit pas seulement la possibilité d’unir la population de son pays sous les mêmes couleurs, le vert et or, mais surtout l’occasion de restaurer l’image de l’Afrique du Sud dans le monde entier, qui est vue alors comme le pays de la haine raciale. Un événement comme la Coupe du monde de rugby bénéficie forcément d’une grande couverture médiatique, très bénéfique pour le pays.

Pour atteindre cet objectif, Nelson Mandela va donc encourager l’équipe de son mieux. Le président va notamment se déplacer lui-même pour empêcher le parti de voter un nouvel emblème et de nouvelles couleurs pour les Springboks.  Selon lui, il ne faut pas enlever à la minorité blanche ce qu’elle chérit le plus sous peine qu’elle se braque.
Il va aussi rencontrer le capitaine, François Pienaar, pour lui exposer sa volonté. François Pienaar joue un très grand rôle dans le film. Il est celui qui va permettre la réunion des deux communautés en influençant les joueurs de son équipe qui sont au début du film peu réceptifs à la « nation arc-en-ciel » voulue par Mandela. Mais peu à peu, ces derniers se rallient à sa cause et participent à la reconstruction du respect de l’équipe de rugby dans les populations. Ils vont notamment, à la demande du Président de la République, faire le tour des townships pour sensibiliser les enfants au rugby. Ils vont aussi par la suite apprendre le nouvel hymne sud-africain choisi par le nouveau gouvernement.

Même si le film montre aussi un Président ouvert sur le monde qui voyage beaucoup pour trouver de nouveaux partenaires financiers qui pourraient investir en Afrique du Sud, le réalisateur a choisi de se centrer principalement sur l’action de Mandela au niveau interne du pays à travers le sport.

Ce qui est très marquant dans le film, c’est le portrait réalisé du personnage principal. Le film met l’accent sur la simplicité de l’homme. Par exemple, ce dernier part courir tous les matins comme pourrait le faire n’importe quel autre homme.
De plus, Mandela, communément appelé Madiba par ses proches, s’intéresse beaucoup aux gens et semble faire attention à chaque détail de chaque personnalité. C’est aussi une personne joviale qui a de l’humour et qui en joue pour séduire les femmes. On découvre alors un personnage séducteur qui aime les femmes mais qui reste néanmoins fidèle à sa femme. Aux vues de ce film, Mandela est aussi quelqu’un de calme qui garde son sang-froid en toute situation ce qui est sans doute dû à sa longue vie et à ses nombreuses expériences. Mandela a connu la prison pendant   trente longues années et ceci est beaucoup souligné dans le film à travers des références comme le poème de William Ernest Henley ou la visite faite par l’équipe de rugby des Springboks à Robben Island. Le film montre aussi certaines faiblesses de Mandela. A plusieurs reprises, celui-ci est pris d’une grande fatigue au point de devoir se reposer pendant quelques jours.

La fin du film montre le dernier match de la Coupe du monde de rugby qui oppose l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande. Le peuple sud-africain est alors uni : il chante le même hymne sous le même drapeau. Les gens se sont réunis pour regarder le match dans tout le pays. Il y a une véritable ferveur populaire.
Alors que le score est nul, l’intensité du film se fait plus forte. Les scènes sont filmées au ralenti. Le spectateur a véritablement l’impression d’être acteur du match.
Lorsque les Sud-Africains sortent victorieux du match, on assiste à une effusion de joie dans tout le pays. En arrière fond, il y a un chant africain très joyeux évoquant la réconciliation.

Critique :

Selon certains auteurs sud-africains, le film de Clint Eastwood, Invictus, propose une version un peu trop hollywoodienne de la réconciliation en Afrique du Sud à l’occasion de la Coupe du monde de rugby en 1995. La fin apparaît en effet idéalisée.
Sur le plan visuel, le film est bien réalisé de manière à ce que l’histoire apparaisse authentique avec des photos d’actualités, une excellente qualité d’image qui rend la moindre imperfection des personnages visible…





Néanmoins, dans la narration, les nuances raciales et politiques de l’Afrique du Sud ont été écartées pour obtenir un produit destiné au grand public c’est-à-dire conforme aux traditions du cinéma. On distingue donc nettement les périodes « avant » et « après » la Coupe du monde.
La période « d’avant » évoque la haine raciale et l’apartheid alors que celle « d’après » renvoie à une joyeuse réconciliation des deux communautés. L’agent de la transformation c’est la Coupe du monde de rugby de 1995 qui, grâce aux conseils de Nelson Mandela, devient un instrument capable d’unifier une société divisée.
Hollywood a donc simplifié l’histoire sud-africaine avec un scénario qui joue avec les émotions du spectateur et qui aboutit à un traditionnel « happy-end ».  
Dans le film, la Coupe du monde de rugby apparaît comme le début d’une démocratie unie. En réalité, cet épisode de l’histoire sud-africaine fait référence à une période d’innocence où la nation espéra un avenir radieux pour une population multiraciale. Mais cette période apparaît avec du recul comme fugace.
Le passé continue d’affecter le présent et sans doute même le futur de l’Afrique du Sud. La réconciliation décrite dans Invictus ne peut en réalité qu’être superficielle. A la fin du film, on assiste à la joie des foules dansant dans les rues de Johannesburg. Les barrières raciales n’existent alors plus. Mais l’intégration raciale exige plus qu’un simple partage de l’espace. Les mentalités n’ont pas encore totalement évolué.
De plus, dans cette version de l’Histoire, Nelson Mandela apparaît comme l’élément unificateur. En réalité, son soutien exprimé en public à l’équipe a bien été indispensable mais d’autres éléments ont été déclencheurs. Notamment le fait que les journalistes aient africanisé le nom des Springboks. Le réalisateur a choisi de faire de Mandela le seul artisan de la réconciliation. Et ceci coïncide avec l’opinion simpliste que se fait la communauté internationale de l’histoire sud-africaine.
Invictus apparaît alors comme une description de la manière dont à l’étranger on comprend l’histoire sud-africaine.



Poème de William Ernest Henley, Invictus (= invaincu en latin)

Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.

In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud.
Under the bludgeonings of chance
My head is bloody, but unbow'd.

Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade,
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.

It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate:
I am the captain of my soul
http://cinepolitique.blospot.fr